Expériences Boliviennes

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Le voyage, c’est être constamment confronté à des choix. Les plus cornéliens sont souvent liés à son itinéraire. La future destination, et le périple pour s’y rendre, pouvant alors impacter l’ensemble de la suite de l’aventure. Doit-on choisir de demander un petit effort supplémentaire aux side-cars pour grimper voir une lagune recommandée par un autre baroudeur, au risque d’essuyer un ennui mécanique ? Peut-on se permettre un détour jusqu’à cette ville, au risque de ne pas avoir le temps d’atteindre la Terre de Feu ?

Nous avons pris la décision d’effectuer un séjour relativement bref sur le territoire bolivien ! Il est difficile d’évaluer sa propre décision dans ces conditions, mais ces quelques jours nous ont tout de même offerts des expériences mémorables.

Baignade dans le lac Titicaca

Le lac Titicaca est le lac naturel le plus élevé au monde. Du haut de ses 3 812 mètres d’altitude, il offre au voyageur la douceur de son décor, le soleil et les montagnes de la Cordillère venant se refléter dans ses eaux bleues.

Il n’en fallait pas moins pour nous donner l’envie de prendre la barre d’une petite barque pour aller explorer l’île de Pata Patani sur le lac mineur. Sur un air de Tri Yann, l’embarcation avance aux pas d’un vieux loup de mer à la rencontre des pêcheurs du lac.

Chaque village des rives du lac possède son équipe de pêcheurs qui se réunissent et s’entraident pour accroître le rendement de leur pêche. Chaque homme est seul sur son embarcation et n’est muni que d’une rame qu’il utilise aussi bien pour se diriger que pour pêcher. La stratégie est simple, les pêcheurs forment un large cercle avec leurs embarcations dans lequel ils emprisonnent un banc de poisson. Ils resserrent progressivement le cercle jusqu’à ce que les embarcations ne soient plus qu’à quelques dizaines de centimètres l’une de l’autre. Les premiers arrivés se dressent alors debout à l’avant de leur barque et transperce l’eau à l’aide de leur rame avec l’espoir d’assommer un poisson.

Sur le chemin qui nous reconduit vers Puerto Perez, nous négocions avec le capitaine de notre navire s’il est possible de piquer une tête dans le lac. Après nous avoir demandé si nous savions nager, il accepte !

Ni une ni deux, nous nous positionnons, avec Julien, debout sur le bastingage du bateau pour un premier plongeon. L’eau est fraîche mais sa transparence nous ensorcelle. Après être parvenus, non sans mal à re-grimper sur le pont, nous voici donc repartis pour un second saut. Le lac n’est pas si profond et les algues viennent nous chatouiller les pieds après chaque impact. Trois brasses plus tard, il est temps pour nous de nous sécher sous le soleil bolivien pendant que la barque poursuit sa route vers le rivage.

Une nuit au milieu du désert de sel

Le Salar de Uyuni est une étendue de sel de 10 582 km située au Sud du pays, à 3 658 mètres d’altitude. Elle s’est formée à la suite de la disparition du lac préhistorique Tauca, 14 000 ans auparavant. Il a ensuite donné naissance à la croûte de sel la plus grande du monde qui recouvre aujourd’hui ce salar.

Pour partir à la découverte de ce désert, nous prenons la décision de laisser au repos nos side-cars et optons pour le “colectivo” (bus local) comme moyen de locomotion. Au gré de ses nombreux allers-retours sur le Salar, le bus est totalement rongé par le sel. La carrosserie est entièrement pictée de rouille et sur le sol, au travers de petits trous, on entrevoit la piste. Cela conforte notre choix de ne pas se rendre sur le Salar avec notre propre véhicule.

Nous partons pour l’île d’Incahuasi en début d’après-midi. Le conducteur démarre le bus à midi trente. Le moteur tousse, les freins couinent un peu, mais rien n’inquiète le chauffeur !

Nous voici donc lancés pour quatre heures de route vers l’île aux cactus. Après 20 kilomètres sur l’axe principal qui mène à La Paz, nous tournons à gauche pour emprunter la piste qui s’enfonce dans le Salar. Au premier virage, les pneus patinent un peu entre les ornières, mais rapidement le véhicule atteint les 80 kilomètres-heure, sa vitesse de croisière. Sur l’étendue de sel, mieux vaut connaître son chemin. Ici personne, ni aucun panneau pour vous indiquer votre direction. La piste est à peine visible, le contraste de la piste blanche sur un fond blanc nécessite une concentration optimale pour ne pas perdre sa trace.

Nous arrivons sur l’île d’Incahuasi en milieu d’après-midi, le temps pour nous de faire une courte randonnée sur l’île au milieu des cactus et de prendre quelques photos sur le Salar. Puis vient la fin d’après-midi, qui sonne pour nous, l’heure de la première bière. Les derniers 4×4 des tours operators quittent le site et nous voici bientôt quasi-seuls sur l’île. Nous avons pour seule compagnie, un guide, la chef cuistot  du restaurant et le vendeur de souvenirs.

Le Salar nous offre alors l’un des plus beaux couchers de soleil de ce début de voyage. Les couleurs du ciel sont incroyables. Autour de nous règne un silence de cathédrale, la bière Huari se déguste avec sagesse.

Après un petit burger de lama au restaurant, nous apprécions la nuit étoilée au milieu de ce désert. La pollution lumineuse étant quasi-nulle, nous pouvons observer les étoiles et constellations de l’hémisphère Sud. Pour la première fois nous mettons le doigt sur la plus célèbre et la plus petite d’entre-elles, « La croix du sud ».

Nous passons la nuit dans le refuge, en compagnie du vendeur de souvenirs. Nous nous réveillons aux aurores pour observer le lever du soleil sur le Salar. De nombreux backpackers, arrivés en 4×4, nous on rejoint pour l’occasion. Le spectacle est moins silencieux que celui de la veille, mais il ne reste pas moins sensationnel. Il est 7h30 du matin quand le colectivo arrive sur l’île. La montée des marches est synonyme d’au-revoir. Nous reprenons la piste avec le même bus ancestral de la veille, laissant dernière nous l’île d’Incahuasi et le Salar d’Uyuni.