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Après une première nuit orageuse sur la péninsule de Manguistaou, nous quittons Shetpe pour rejoindre Aktaou. À la sortie de la ville, petites sueurs froides, les trois premières stations que nous croisons ne délivrent que du gaz. Ce n’est que dans la quatrième que nous trouvons de l’essence qui nous permettra de rejoindre la ville majeure de la région.
En chemin, nous faisons un arrêt à proximité d’une lagune où s’hydratent des chevaux sauvages. Un troupeau de chèvres traverse la route devant les side-cars pour les rejoindre, suivi par leur berger en voiture. Quelques dizaines de kilomètres plus loin, nous réalisons un second arrêt au milieu du désert, informés par les locaux de la présence de rochers sacrés. Mais après une marche de 5 kilomètres au milieu de la vaste steppe, ces gros rochers à la forme de gros boulets de canon de plus d’un mètre de diamètre, restent introuvables. La vue sur la vallée est cependant impressionnante et permet de relativiser cet échec. La faune qui nous entoure est également hors-du-commun, de gros insectes ressemblant à de gros criquets volent autour de nous, de gros lézards profitent du soleil sur le sol rocailleux et Julien et Marie apercevront même des tortues nichées dans de nombreux trous qui jonchent le sol.
Après ces expéditions dans la steppe kazakh, nous faisons notre entrée dans Aktaou en fin d’après-midi. Nous nous offrons un dîner fait de chachliks et de bières avant d’entamer une marche jusqu’au bord de mer. Après avoir traversé une zone industrielle, nous arrivons étonnamment sur une plage privée . À cette heure tardive, nous prenons le risque de rentrer sans autorisation dans cet espace clos. Dès nos premiers pas à proximité des parasols fixes, le gardien nous interpelle et comprend rapidement que nous sommes des touristes. Il autorise alors finalement notre présence. Nous profitons du coucher du soleil depuis le ponton en plastique. J’en profite même pour faire les premières brasses dans la mer Caspienne. Mais en toute honnêteté, l’odeur nauséabonde des algues a grandement gâché cette courte baignade.
Le retour vers notre hôtel se fera sous les incroyables couleurs mauves du ciel ; entre les conteneurs et les vieux tuyaux de gaz suspendus dans les airs. Lors de notre traversée de ces anciennes républiques soviétiques, nous avons pu tirer une conclusion ; l’esthétisme urbain n’a que trop rarement constitué une préoccupation majeure pour les autorités locales.
Après une matinée de repos, passée à mettre à jour le site internet et les réseaux sociaux, il est 13h quand nous partons arpenter la ville à pied. Nous faisons un bref arrêt dans un centre commercial pour trouver une matriochka (poupée gigogne) et une chemise en vue du futur entretien professionnel de Julien par Skype. Une session “shopping” qui nourrit notre envie de prendre de nouveau soin de nous, en nous faisant redécouvrir la joie des cabines d’essayage. Mais nous nous retenons de “craquer” pour ne pas encombrer davantage nos valises si difficiles à refermer après chaque bivouac.
Aktaou est une ville balnéaire dont le cœur bat entre mer et désert. Elle a, sous l’ère soviétique, subit d’importante mutation suite à la découverte de pétrole dans la mer Caspienne, transformant alors la petite ville minière en une importante ville moderne. Aujourd’hui dans le centre-ville, les vieux immeubles et monuments soviétiques côtoient l’architecture des nouveaux édifices aux grandes parois vitrées. En déambulant dans ses rues, nous découvrons ici aussi un imposant monument célébrant la victoire lors de la seconde guerre mondiale, mais également son phare, sa plage publique et sa riviera récemment réaménagée. En fin d’après-midi nous savourons sur le sable, une glace au kiwi qui nous donne un avant-goût des sorbets italiens. Elle ne leur arrive pas à la cheville, mais fait tout de même sacrément plaisir.
Le lendemain, nous prenons contact avec Sergeï, un guide de la péninsule de Manguistaou qui nous l’espérons pourra nous aider à nous rendre dans le désert de Boszhira. D’après nos recherches, les pistes dans le désert sont en mauvaises états et les températures des plus arides risquent de faire souffrir les moteurs des Ural ; c’est pourquoi nous prenons la décision de faire appel à un guide et son 4×4 pour découvrir ce trésor de la péninsule.
Juste avant de retrouver notre homme, nous mangeons sur le pouce des samsas (samoussa kazakh) et une kutab (galette d’herbes fraiches) à l’ombre des arbres. Comme dans toute la ville, des centaines de papillons virevoltent autour de nous lors de ce festin.
Notre rendez-vous avec Sergeï se fait au pied de la grande roue, installée dans le parc principal du centre-ville. Nous lui exposons alors notre projet de visiter la vallée de Boszhira avant de prendre le bateau pour rejoindre Bakou en Azerbaijan. Après une heure passée avec cet Indiana Jones Kazakh d’une quarantaine d’années, barbe grisonnante et chemisette à poche ; c’est pour l’instant choux blanc ! Ni lui, ni ses contacts, ne sont disponibles pour encadrer une expédition de deux jours avec un départ dès le lendemain. Mais il ne désespère pas et continue de laisser des messages WhatsApp à ses collègues. Quelques minutes plus tard, sa persévérance paiera puisqu’il obtiendra une réponse positive de son ami Cola qui nous accompagnera pour cette expédition.
Le lendemain, c’est avec un petit quart d’heure de retard que nous retrouvons Cola sur le parking de notre hôtel. Pour nous rendre à Boszhira, nous rejoignons tout d’abord la ville de Janaozën. La voiture file à toute allure sur l’autoroute la plus basse du monde (le GPS indique -119 mètres). Dans son habitacle pas un mot, Cola ne parle pas anglais et notre russo-kazakh est toujours aussi limité. Seule la musique électronique locale vient rompre le silence. Passé cette ville étape, la route se rétrécit mais l’asphalte reste bon. On se demande alors, au fond de nous, pourquoi nous n’avons pas réalisé cette aventure avec nos propres side-cars. Une trentaine de kilomètres plus loin, nous bifurquons à gauche sur la première piste du jour. Cola, cependant, ne réduit pas l’allure. Au premier point de vue, nous rejoignons un deuxième 4×4, celui de son ami guide, Vlad, qui accompagne un couple Kazakho-Danois.
Le point de vue suivant se trouve au checkpoint de l’étape du Rallye du Kazakhstan qui s’est terminé la veille. Il surplombe la vallée de Boszhira et ses fameux “Crocs du Plateau d’Ousthyurt.” Nous pique-niquerons tous ensemble sous une tenture tendue entre les toits des 4×4, face à ces deux pics de calcaire de 200 mètres de hauteur qui jaillissent de la plaine. Cette vaste étendue, blanche comme neige, désertée par les arbres, les lacs et les rivières, était il y a quelques millions d’années submergée sous l’océan Thétys. Pour prouver la véracité de son histoire, Vlad nous présente sur son collier une dent de requin trouvée ici au cœur du désert.
Nous reprenons ensuite la piste et suivons la poussière du 4×4 de Vlad pour atteindre un impressionnant canyon. Les véhicules enchaînent ensuite de gros franchissements pour rejoindre un nouveau pic rocheux. Nous révisons finalement notre position du matin quant à la possibilité de venir jusqu’ici en side-car. Nous escaladons pendant près d’une heure et sous un soleil de plomb le versant de cette falaise pour obtenir une vue somptueuse sur l’ensemble de la vallée.
C’est au pied de cette falaise, sans Vlad et nos amis Kazakho-Danois qui ont repris la route de Aktaou, que nous montons le campement en cette fin d’après-midi. Cola a stationné le 4×4 dans une des failles creusées par l’océan. A l’abri du vent, nous déplions les tentes dans ce décor merveilleux. Derrière nous, Cola prépare le dîner sur son réchaud au gaz. Au menu, fruits secs, pâtes, patates et viande. La soirée se poursuit par une nouvelle ascension sur le pic pour y admirer le coucher du soleil. Lors de la descente, nous contemplons les éclairs d’un orage qui s’abattent au loin sur la vallée. Le ciel dénué de toute pollution lumineuse sera l’opportunité d’une session photos sous les étoiles. Avant de nous glisser dans nos duvets, une dernière épreuve nous attend. Il nous faut alors nous battre avec une multitude de papillons de nuit attirés par la lumière de nos lampes frontales et faire face à une énorme araignée jaune, venue nous intimider au moment de nous approcher de nos tentes.
Après une nuit de sommeil au cœur du désert, le réveil sonne à 5h du matin. Nous nous extrayons en douceur de nos duvets pour prendre place au milieu de ce vaste décor. L’attente, paisible et silencieuse avant le réveil de la faune locale, rend le moment magique. Les premiers rayons du soleil viennent illuminer les deux remarquables “crocs” qui transpercent la vallée et ses couleurs saisissantes aux teintes pourpres.
De retour au camp de base, nous prenons le petit-déjeuner avec Cola qui nous propose un porridge local, avant de reprendre la route vers Aktaou. Le 4×4 file en ligne droite sur le relief plat de ce désert. Ce matin, il semble étrangement dépourvu de toute aspérité. Nous atteignons rapidement la “Montagne Sherkala” aussi surnommée la “montagne à la ligne rose”. Sa forme s’apparente à une immense yourte qui trône au milieu de la vaste plaine désertique. Après quelques photos, nous remontons dans le véhicule et contournons le monticule par l’Est avant de revenir sur nos pas. Les traces sur ce type de surface, dépourvu de végétation, se ressemblent toutes et Cola ne semble plus retrouver celle qui nous ramènera à bon port. Impuissant, nous le regardons hésiter changeant régulièrement de sillons pour finalement ressortir de cette vaste étendue par une côte sableuse qui permet de rejoindre le plateau. En haut de cette dernière, deux français à vélo nous arrêtent. Ils roulent dans le désert depuis maintenant trois jours, réalisant un aller-retour depuis Senek pour voir les crocs de la vallée de Boszhira. Mais à ce moment de leur expédition, il ne leur reste plus que 1,5 litre d’eau par personne pour faire face à la dernière journée de piste et rejoindre le premier village. En guise de comparaison, nous avons consommé la veille pas moins de 8 litres d’eau par personne et ce bien que nous progression dans le désert en 4×4. Pour leur venir en aide, Cola leur propose de charger leurs bicyclettes sur le toit du Land-Rover et de les conduire au village le plus proche.
Sur la route du retour, nous faisons une courte pause pour observer une tortue sur le bord de la piste. Cola constate alors une crevaison sur la roue arrière droite du 4×4. Nous obligeant à rejoindre Senek à coup régulier de compresseur. Alors que cette journée semblait déjà bien mouvementée, dans les derniers kilomètres avant Aktaou, Cola s’arrête une dernière fois pour porter assistance à une voiture à l’arrêt sur la bande d’arrêt d’urgence et la remorque à l’aide d’une sangle jusqu’à l’entrée de la ville. Notre homme est un véritable super-héros du désert !
Le lendemain, remis de nos émotions, nous descendons prendre le petit-déjeuner à l’hôtel. Après ces quelques jours passés ici, nous connaissons par cœur la carte. Les oeufs y sont à tomber par terre et les crêpes nous font voyager jusqu’en Bretagne. Mais à cette heure-là, nous ne savions pas encore que ce serait le dernier. Le jour même nous apprenons qu’il nous faut rejoindre rapidement le port de Kourik pour prendre la mer en direction de l’Azerbaïdjan.
NOS COUPS DE COEUR |
Où manger ?
Craft Burger Une petite adresse à l’ambiance jeune et chaleureuse, à quelques mètres de la plage public. Nous y avons été accueillis avec la plus grande gentillesse pour savourer de bons burgers. Restaurant « Makcim » Face à notre hotel, le Zeruik, nous avions pris nos habitudes dans cette petite cantine familiale sans prétention, en retrait du centre-ville. Nous y sommes venus à plusieurs reprises déguster une excellente salade César et un très bon chachlik, sur une belle terrasse ombragée. |