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Notre aventure dans les Balkans débute sous la pluie, nos tenues fluorescentes sur les épaules.
Pour rejoindre la « Riviera Albanaise », il nous faut traverser les montagnes et ses paysages sauvages avant de plonger vers son magnifique littoral et la station balnéaire de Sarandë. À notre arrivée sur la côte, les averses deviennent plus éparses. Nous mettons alors le cap au nord et empruntons la route SH8 qui serpente entre les falaises escarpées et les plages de sable blanc. La côte est magnifique. Cette route en hauteur surplombe l’eau turquoise ; et les montagnes environnantes semblent prendre un malin plaisir à y plonger, découpant alors de jolies criques.
Au fil des kilomètres, elle dessert les petites stations balnéaires venues se lover dans les interstices de son relief et traverse de jolis villages hors du temps aux rues étroites et pavées. Après la ville de Dhermi, la route s’élève de nouveau pour franchir le mont Thanasit qui symbolise la fin de cette riviera. De l’autre côté du col, les lacets au milieu des pins noirs se succèdent. À l’ombre de la dense forêt du parc National Llogara, la descente s’effectue avec prudence ; trop peut-être, puisque notre side-car dégage une odeur de brûlé qui nous met en alerte. Nous parvenons à nous arrêter à la sortie d’un virage, pour constater la surchauffe des plaquettes de frein avant ; une situation qui altérait gravement notre capacité à ralentir le véhicule. Pour faire redescendre en température ces plaques de métal fritté, nous jetons un plein jerricane d’eau dessus, avant de reprendre avec une grande prudence la fin de notre descente. Trois lacets plus loin nous retrouvons, rassurés, la plaine à hauteur de la ville de Vlora.
Au Monténégro, dès la frontière passée, nous quittons la route principale pour grimper dans les montagnes et atteindre le point de vue qui surplombe le lac Skadar. Ce lac est le plus important de la péninsule Balkanique et constitue une frontière naturelle entre l’Albanie et le Monténégro.
Après le point de vue, la petite route ondule entre lac et montagne en suivant le pourtour accidenté du lac et en traversant des villages perchés. Sur ce ruban asphalté, les voitures se croisent difficilement. De part et d’autre, des murets de pierre délimitent les champs dans lesquels broutent ânes et moutons. Pour autant, en empruntant cette route, c’est comme si le temps c’était arrêté. Il ne semble y avoir personne à plusieurs kilomètres à la ronde, juste nous, le lac et la montagne.
La fin de cette route P16, nous conduit au charmant village médiéval de Godinje. Ses maisons en pierre penchent les unes vers les autres dans une cacophonie architecturale si attachante. Puis les rives du lac viennent titiller la ville de Virparaz ; nous y refermons cette parenthèse enchantée, traversant une multitude de tunnels sur cet axe principal très fréquenté qui rejoint la célèbre baie de Kotor.
En Bosnie-Herzégovine, après la ville médiévale de Mostar, nous sommes charmés par la petite route sinueuse qui suit le lit de la rivière Neretva, offrant là encore de somptueux paysages sous les douces lumières de la fin de journée.
En contrebas, le lac Jablanicko et ses reflets aux couleurs surnaturelles s’étend entre les montagnes des Alpes Dinariques, au cœur d’une nature spectaculaire que forme le parc naturel de Blidinje et du mont Prenj, surnommé l’Himalaya Bosniaque. Au nord du lac, la rivière creuse un sillon et forme des gorges impressionnantes, dans lesquelles sont venues s’implanter de petites villes, construites autour de vieilles usines qui semblent dater de l’ère soviétique. Un retour dans le temps s’opère, accentué par les nombreuses stèles qui bordent la route, en hommage aux soldats morts pendant le conflit de la guerre de Yougoslavie, à la fin des années 90.
En direction de la Croatie, de nombreux vieux véhicules Volswagen : Golf, Polo ou Transporter nous accompagnent. Nous traversons de vastes plaines agricoles. En cette période estivale, l’heure est au ramassage du foin. Dans les champs, c’est l’effervescence. La technologie est en osmose avec les techniques ancestrales. Ainsi, pas de round ballers mais des meules de paille entassées autour d’un pic de bois qui n’est pas sans rappeler Napoléon et Lafayette des Aristochats qui, bien que confortablement installés dans leur panier de side-cars, connaîtront les déboires d’une course folle la tête dans l’une de ses meules.
Après la visite des lacs de Plitvice et avant de reprendre la route en direction de la Slovénie, c’est à notre tour de connaître une déconvenue. Alors que Julien vérifie la roue de son panier, dont le disque de frein semble faire du bruit ; c’est finalement sur Karadoc qu’il constate une fissure sur notre châssis. Un coup de « blanco » est alors appliqué pour pouvoir suivre son évolution et évaluer la distance pouvant être effectuée avant de trouver un soudeur.
Nous poursuivons doucement notre périple en direction du nord, effectuant une pause tous les 20 kilomètres pour analyser l’évolution de la situation. Mais 100 kilomètres plus loin, dans la ville de Karlovac, nous prenons la décision de mettre un terme à notre étape quotidienne, pour y réparer la fissure le lendemain, chez un soudeur repéré sur internet.
Localisé dans la zone industrielle, au nord de la ville. Nous nous présentons dans ce garage situé derrière une maison pavillonnaire. Sur le petit parking en contrebas, est garée une vieille Zastava qui ressemble à peu de chose près, à une vieille Fiat 500, parfaitement retapée, une preuve pour nous du sérieux et du professionnalisme du soudeur. Les choses s’enchaînent alors très vite. Le jeune garagiste regarde notre fissure, demande de rentrer l’Ural dans son garage et se lance dans le nettoyage de la cicatrice avant de ressouder la fissure. La réparation est effectuée en quelques minutes et contre quelques euros. Mais après une étude plus approfondie, triste est de constater que la réparation n’a pas été faite très proprement. Le plus important reste qu’elle devrait nous permettre de poursuivre pour plusieurs centaines de kilomètres et l’espoir d’atteindre Ural en Autriche.
Nous sommes donc de retour sur la route, mais les ennuis s’accumulent puisqu’une centaine de kilomètres plus loin c’est au tour de l’injecteur droit de Perceval de faire des siennes. Nous échangeons par message avec Marina, l’importatrice de pièces à l’usine de Irbit, pour avoir quelques conseils de la part de la manufacture. Mais le diagnostic reste celui de devoir changer l’injecteur. Par chance, la marque des side-cars nous avait fait le don d’un injecteur de rechange avant notre départ et c’est finalement en Croatie après 34 000 kilomètres qu’il nous faut effectuer cette opération, réalisée par Julien à la station essence où nous sommes arrêtés.
C’est en fin d’après-midi que nous atteignons le petit poste frontière qui nous permet d’entrer en Slovénie et de refermer cette aventure Balkanique.