Expérience kazakhe

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La traversée de la Mer Caspienne

Dans tout carnet de route, il est mentionné que “le voyage est plus important que la destination”. La traversée de la mer Caspienne en est une expérience des plus symptomatiques de notre périple, qui révèle à elle seule toute la véracité de ce dicton.

Dès l’étude de l’itinéraire nous avions rapidement pris conscience que voyager à bord d’un cargo entre le Kazakhstan et l’Azerbaïdjan ne transpirait pas la simplicité. Et les premières recherches de retour d’expérience sur cette traversée, ne firent que confirmer nos craintes…

Le rythme des liaisons dépendrait de la météo et des cargaisons transportées. Aucun horaire d’embarquement ne pourrait être connu à l’avance et les billets seraient introuvables… Toutes sortes d’histoires qui forgent le mythe de cette traversée !

Nous nous y étions donc préparé et cela n’a pas loupé, s’armer de patience fut donc le maître mot de cette expérience.

À notre arrivée dans la ville de Aktaou, étant donné l’absence de jours et horaires précis quant au départ des bateaux, notre premier objectif fut d’obtenir cette précieuse information. Ainsi, lors de nos pérégrinations dans les rues, nous questionnons tout bureau qui s’apparente à une agence de voyage. En vain !

Mais le hasard fait bien les choses. Alors que nous étions en pleine programmation de notre aventure dans la Vallée de Boszhira, Sergueï nous propose de nous conduire dans son 4×4 d’aventurier jusqu’au bureau d’une compagnie de ferry pour que l’on y obtienne de plus amples informations sur les prochains départs de bateau. Julia, l’agent de la compagnie, nous invite à revenir le mardi après-midi pour acheter des billets pour un bateau qui partirait le mercredi.

De bon matin, après un premier appel auprès de l’agence, cette dernière nous invite à passer acheter nos billets en cette fin d’après-midi. Et alors que le délai semblait des plus larges, au fil de la conversation notre timing commence à fondre à vitesse grand V. Alors qu’en début de conversation Julia nous invitait à prendre la route pour le port le lendemain matin à 8h, après de plus amples renseignements nous précisant qu’il nous fallait notamment enregistrer nos motos auprès des douaniers, elle nous conseilla de prendre immédiatement la direction du port.

Passage express par l’hôtel pour plier nos affaires et payer nos dettes. Il est 20h quand nous quittons le parking de l’hôtel pour rejoindre le port de Kourik à 80 km au Sud de Aktaou.

Les couleurs sont belles à la tombée de la nuit. Arrivés à hauteur du village de Kourik, nous empruntons une route sur la droite. Alors que nous pensions que les derniers kilomètres se feraient sur une piste, c’est finalement sur un asphalte tout neuf que nous rejoignons la zone portuaire.

C’est dans le noir et sous un épais brouillard que nous atteignons le port. Nous ne nous attendions pas à voir ces bâtiments si moderne au milieu de nul part. En compagnie d’une équipe internationale de routiers ; de Christoph et Maïka, un couple d’allemands  au volant d’un van UAZ ; et de Yves, un français au volant de sa Lada Gigouli ; nous procédons à l’enregistrement de nos véhicules sur le prochain ferry du lendemain.

La procédure d’enregistrement est légèrement désorganisée, mais tout fini par rentrer dans l’ordre et nous franchissons les barrières qui symbolisent l’entrée du port.  Après avoir réalisé la sortie du territoire et de nos véhicules auprès de la douane ; nous partageons et savourons un plat de pâtes autour de la cuisine de Ahmet, aménagée dans une petite caisse sur le côté de la remorque de son camion. Nous passons la soirée sur le parking, en compagnie de notre joyeuse équipe, puis installons notre campement dans les couloirs de la douane.

Sur les coups de 9h, les employés arrivent au compte-goutte pour prendre leur poste dans les bureaux de la douane. Alors que nous prenons tranquillement notre petit-déjeuner dans la cafétéria du port, nous sommes interrompus par les agents de la douane, sans même pouvoir finir notre thé, pour la fouille de nos véhicules. Alors que nous patientons depuis plusieurs heures, il nous faut d’un coup être des plus réactifs et accélérer le pas.

Le contrôle se passe sans encombre. Les chiens sont plus préoccupés à jouer avec une bouteille en plastique que par le contenu de nos valises.

Nous patientons de nouveau toute la fin de matinée. Nous observons un premier bateau partir, chargé de wagons de marchandises. À 10h, notre ferry « Professor Gul” fait son entrée dans le port. Une petite heure après s’être déchargé de ses véhicules arrivant de Bakou, c’est à notre tour de nous approcher des quais d’embarquement. Nous devons encore patienter, le temps que de nouveaux wagons prennent place dans la cale du bateau, occupant une grande partie de ce pont inférieur.

Nous accompagnerons pendant cette traversée cinq routiers dont Ahmet ; Maïka, Christoph et leur UAZ (@bibi.und.hilde) ; Yves, Juliette, Solann et leur Gigouli ; Mario et Gema à vélo (@apinonfijo) accompagnés de David et Ally eux aussi amateurs des coups de pédale (@wheely_far). Pour compléter cette fine équipe, montrons également sur le bateau deux familles kazakhes et leurs voitures. Une fois les véhicules garés dans la cale, nous prenons possession de nos cabines à l’aménagement des plus rudimentaires et patientons encore deux petites heures, le temps de faire tamponner nos passeports par deux membres de l’armée montés spécialement sur le bateau pour l’occasion.

Il est 18h quand les moteurs du bateau se mettent enfin à rugir, soit 20 heures après notre arrivée. Le port de Kourik s’éloigne progressivement.

Nous débutons la traversée en savourant un thé en compagnie de la joyeuse troupe avant que le dîner ne soit rapidement servi dans la cantine du bateau.

Un apéritif est improvisé au coucher du soleil, sur le pont supérieur du ferry. Nous partageons les quelques gouttes d’alcool que nous avons dans nos valises et discutons ensemble de nos périples respectifs. Les membres de l’équipage se joignent à notre troupe de “routards ». Des notes de russe, turc, français, anglais et espagnol s’échappent entre les deux tours de fumée qui s’échappent des cheminées du bateau.

Au menu du petit-déjeuner, oeufs durs dans la petite cantine du bateau, avant que chacun des voyageurs ne vaque à ses occupations : lecture, parties de “dutch” (jeu de cartes) enflammées, série tv… Vient de nouveau l’heure du thé qui laisse rapidement sa place au déjeuner. En début d’après-midi, Bakou est en vu, les plateformes pétrolières agrémentent également le paysage. Nous devons encore patienter puisque notre port d’arrivée, Alat, se situe à 70km au sud de la ville. Nous y accostons vers 16h, heure locale (-1h/Kazaksthan). Il nous faut une nouvelle fois patienter alors que la porte du pont vient d’être descendue sur le quai ; David en vrai acrobate, en profite pour se lancer dans une petite représentation de diabolo.

C’est dans un premier temps à pied que nous nous dirigeons vers les services de douane Azeri. Nous y présentons nos “e-visas” en échange du tampon sur nos passeports. Pour Emilie et moi quelques soucis informatiques allongeront le temps de traitement de notre dossier et fera monter d’un cran notre niveau de stress.

Puis il nous faut sortir les motos du bateau et passer les valises et top-cases aux rayons X, sur un tapis roulant similaire à ceux des aéroports. Les douaniers sont à la recherche de drones qu’ils pourraient confisquer du fait de l’interdiction stricte de les utiliser dans le pays. Julien passant le premier, nous alerte à ce sujet. Nous cachons alors le nôtre dans le fond du coffre du panier. “Ni vu, ni connu,” il passe entre les mailles du filet.

Nous poursuivons notre périple administratif en réalisant l’import des side-cars auprès du bureau suivant. Nous y sommes accueillis par un jeune douanier qui parle anglais. Une fois le sésame obtenu, il nous indique la sortie du port, nous assurant que l’ensemble des démarches sont accomplies. Information étonnante puisque nous n’avons pas encore  payé le passage des motos sur le ferry.

Arrivée à la dernière barrière avant la sortie du port, nous présentons l’ensemble des documents en notre possession. Comme attendu, l’agent nous indique qu’il nous manque effectivement un document que l’on se procure à la “Kasa.” Nous suivons leurs indications pour trouver ce guichet caché derrière le parking de l’embarcadère, dans un vieux conteneur aménagé en bureau. Nous y rejoignons finalement l’ensemble de nos amis “routards.” On ne comprend pas ce qu’il faut payer, à qui, pourquoi, à quel guichet. Certains en échange de nos dollars nous donnent des tickets, d’autres nous dirigent vers un autre guichet pour obtenir un reçu , bref c’est un joyeux bazar !

Nous finissons par nous acquitter du passage de nos motos pour la modique somme de 110 dollars US. Il est 22h, nous quittons le port en compagnie de Maïka et Christoph, le cortège des véhicules russes avalent les 70 km qui les séparent de Bakou, avant de partir à la découverte de l’Azerbaïdjan.

Aktaou et la péninsule de Manguistaou – 7 jours – 22 mètres d’altitude

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Après une première nuit orageuse sur la péninsule de Manguistaou, nous quittons Shetpe pour rejoindre Aktaou. À la sortie de la ville, petites sueurs froides, les trois premières stations que nous croisons ne délivrent que du gaz. Ce n’est que dans la quatrième que nous trouvons de l’essence qui nous permettra de rejoindre la ville majeure de la région.

En chemin, nous faisons un arrêt à proximité d’une lagune où s’hydratent des chevaux sauvages. Un troupeau de chèvres traverse la route devant les side-cars pour les rejoindre, suivi par leur berger en voiture. Quelques dizaines de kilomètres plus loin, nous réalisons un second arrêt au milieu du désert, informés par les locaux de la présence de rochers sacrés. Mais après une marche de 5 kilomètres au milieu de la vaste steppe, ces gros rochers à la forme de gros boulets de canon de plus d’un mètre de diamètre, restent introuvables. La vue sur la vallée est cependant impressionnante et permet de relativiser cet échec. La faune qui nous entoure est également hors-du-commun, de gros insectes ressemblant à de gros criquets volent autour de nous, de gros lézards profitent du soleil sur le sol rocailleux et Julien et Marie apercevront même des tortues nichées dans de nombreux trous qui jonchent le sol.

Après ces expéditions dans la steppe kazakh, nous faisons notre entrée dans Aktaou en fin d’après-midi. Nous nous offrons un dîner fait de chachliks et de bières avant d’entamer une marche jusqu’au bord de mer. Après avoir traversé une zone industrielle, nous arrivons étonnamment sur une plage privée . À cette heure tardive, nous prenons le risque de rentrer sans autorisation dans cet espace clos. Dès nos premiers pas à proximité des parasols fixes, le gardien nous interpelle et comprend rapidement que nous sommes des touristes. Il autorise alors finalement notre présence. Nous profitons du coucher du soleil depuis le ponton en plastique. J’en profite même pour faire les premières brasses dans la mer Caspienne. Mais en toute honnêteté, l’odeur nauséabonde des algues a grandement gâché cette courte baignade.

Le retour vers notre hôtel se fera sous les incroyables couleurs mauves du ciel ; entre les conteneurs et les vieux tuyaux de gaz suspendus dans les airs. Lors de notre traversée de ces anciennes républiques soviétiques, nous avons pu tirer une conclusion ; l’esthétisme urbain n’a que trop rarement constitué une préoccupation majeure pour les autorités locales.

Après une matinée de repos, passée à mettre à jour le site internet et les réseaux sociaux, il est 13h quand nous partons arpenter la ville à pied. Nous faisons un bref arrêt dans un centre commercial pour trouver une matriochka (poupée gigogne) et une chemise en vue du futur entretien professionnel de Julien par Skype. Une session “shopping” qui nourrit notre envie de prendre de nouveau soin de nous, en nous faisant redécouvrir la joie des cabines d’essayage. Mais nous nous retenons de “craquer” pour ne pas encombrer davantage nos valises si difficiles à refermer après chaque bivouac.

Aktaou est une ville balnéaire dont le cœur bat entre mer et désert. Elle a, sous l’ère soviétique, subit d’importante mutation suite à la découverte de pétrole dans la mer Caspienne, transformant alors la petite ville minière en une importante ville moderne. Aujourd’hui dans le centre-ville, les vieux immeubles et monuments soviétiques côtoient l’architecture des nouveaux édifices aux grandes parois vitrées. En déambulant dans ses rues, nous découvrons ici aussi un imposant monument célébrant la victoire lors de la seconde guerre mondiale, mais également son phare, sa plage publique et sa riviera récemment réaménagée. En fin d’après-midi nous savourons sur le sable, une glace au kiwi qui nous donne un avant-goût des sorbets italiens. Elle ne leur arrive pas à la cheville, mais fait tout de même sacrément plaisir.

Le lendemain, nous prenons contact avec Sergeï, un guide de la péninsule de Manguistaou qui nous l’espérons pourra nous aider à nous rendre dans le désert de Boszhira. D’après nos recherches, les pistes dans le désert sont en mauvaises états et les températures des plus arides risquent de faire souffrir les moteurs des Ural ; c’est pourquoi nous prenons la décision de faire appel à un guide et son 4×4 pour découvrir ce trésor de la péninsule.

Juste avant de retrouver notre homme, nous mangeons sur le pouce des samsas (samoussa kazakh) et une kutab (galette d’herbes fraiches) à l’ombre des arbres. Comme dans toute la ville, des centaines de papillons virevoltent autour de nous lors de ce festin.

Notre rendez-vous avec Sergeï se fait au pied de la grande roue, installée dans le parc principal du centre-ville. Nous lui exposons alors notre projet de visiter la vallée de Boszhira avant de prendre le bateau pour rejoindre Bakou en Azerbaijan. Après une heure passée avec cet Indiana Jones Kazakh d’une quarantaine d’années, barbe grisonnante et chemisette à poche ; c’est pour l’instant choux blanc ! Ni lui, ni ses contacts, ne sont disponibles pour encadrer une expédition de deux jours avec un départ dès le lendemain. Mais il ne désespère pas et continue de laisser des messages WhatsApp à ses collègues. Quelques minutes plus tard, sa persévérance paiera puisqu’il obtiendra une réponse positive de son ami Cola qui nous accompagnera pour cette expédition.

Le lendemain, c’est avec un petit quart d’heure de retard que nous retrouvons Cola sur le parking de notre hôtel. Pour nous rendre à Boszhira, nous rejoignons tout d’abord la ville de Janaozën. La voiture file à toute allure sur l’autoroute la plus basse du monde (le GPS indique -119 mètres). Dans son habitacle pas un mot, Cola ne parle pas anglais et notre russo-kazakh est toujours aussi limité. Seule la musique électronique locale vient rompre le silence. Passé cette ville étape, la route se rétrécit mais l’asphalte reste bon. On se demande alors, au fond de nous, pourquoi nous n’avons pas réalisé cette aventure avec nos propres side-cars. Une trentaine de kilomètres plus loin, nous bifurquons à gauche sur la première piste du jour. Cola, cependant, ne réduit pas l’allure. Au premier point de vue, nous rejoignons un deuxième 4×4, celui de son ami guide, Vlad, qui accompagne un couple Kazakho-Danois.

Le point de vue suivant se trouve au checkpoint de l’étape du Rallye du Kazakhstan qui s’est terminé la veille. Il surplombe la vallée de Boszhira et ses fameux “Crocs du Plateau d’Ousthyurt.” Nous pique-niquerons tous ensemble sous une tenture tendue entre les toits des 4×4, face à ces deux pics de calcaire de 200 mètres de hauteur qui jaillissent de la plaine. Cette vaste étendue, blanche comme neige, désertée par les arbres, les lacs et les rivières, était il y a quelques millions d’années submergée sous l’océan Thétys. Pour prouver la véracité de son histoire, Vlad nous présente sur son collier une dent de requin trouvée ici au cœur du désert.

Nous reprenons ensuite la piste et suivons la poussière du 4×4 de Vlad pour atteindre un impressionnant canyon. Les véhicules enchaînent ensuite de gros franchissements pour rejoindre un nouveau pic rocheux. Nous révisons finalement notre position du matin quant à la possibilité de venir jusqu’ici en side-car. Nous escaladons pendant près d’une heure et sous un soleil de plomb le versant de cette falaise pour obtenir une vue somptueuse sur l’ensemble de la vallée.

C’est au pied de cette falaise, sans Vlad et nos amis Kazakho-Danois qui ont repris la route de Aktaou, que nous montons le campement en cette fin d’après-midi. Cola a stationné le 4×4 dans une des failles creusées par l’océan. A l’abri du vent, nous déplions les tentes dans ce décor merveilleux. Derrière nous, Cola prépare le dîner sur son réchaud au gaz. Au menu, fruits secs, pâtes, patates et viande. La soirée se poursuit par une nouvelle ascension sur le pic pour y admirer le coucher du soleil. Lors de la descente, nous contemplons les éclairs d’un orage qui s’abattent au loin sur la vallée. Le ciel dénué de toute pollution lumineuse sera l’opportunité d’une session photos sous les étoiles. Avant de nous glisser dans nos duvets, une dernière épreuve nous attend. Il nous faut alors nous battre avec une multitude de papillons de nuit attirés par la lumière de nos lampes frontales et faire face à une énorme araignée jaune, venue nous intimider au moment de nous approcher de nos tentes.

Après une nuit de sommeil au cœur du désert, le réveil sonne à 5h du matin. Nous nous extrayons en douceur de nos duvets pour prendre place au milieu de ce vaste décor. L’attente, paisible et silencieuse avant le réveil de la faune locale, rend le moment magique. Les premiers rayons du soleil viennent illuminer les deux remarquables “crocs” qui transpercent la vallée et ses couleurs saisissantes aux teintes pourpres.

De retour au camp de base, nous prenons le petit-déjeuner avec Cola qui nous propose un porridge local, avant de reprendre la route vers Aktaou. Le 4×4 file en ligne droite sur le relief plat de ce désert. Ce matin, il semble étrangement dépourvu de toute aspérité. Nous atteignons rapidement la “Montagne Sherkala” aussi surnommée la “montagne à la ligne rose”. Sa forme s’apparente à une immense yourte qui trône au milieu de la vaste plaine désertique. Après quelques photos, nous remontons dans le véhicule et contournons le monticule par l’Est avant de revenir sur nos pas. Les traces sur ce type de surface, dépourvu de végétation, se ressemblent toutes et Cola ne semble plus retrouver celle qui nous ramènera à bon port. Impuissant, nous le regardons hésiter changeant régulièrement de sillons pour finalement ressortir de cette vaste étendue par une côte sableuse qui permet de rejoindre le plateau. En haut de cette dernière, deux français à vélo nous arrêtent. Ils roulent dans le désert depuis maintenant trois jours, réalisant un aller-retour depuis Senek pour voir les crocs de la vallée de Boszhira. Mais à ce moment de leur expédition, il ne leur reste plus que 1,5 litre d’eau par personne pour faire face à la dernière journée de piste et rejoindre le premier village. En guise de comparaison, nous avons consommé la veille pas moins de 8 litres d’eau par personne et ce bien que nous progression dans le désert en 4×4. Pour leur venir en aide, Cola leur propose de charger leurs bicyclettes sur le toit du Land-Rover et de les conduire au village le plus proche.

Sur la route du retour, nous faisons une courte pause pour observer une tortue sur le bord de la piste. Cola constate alors une crevaison sur la roue arrière droite du 4×4. Nous obligeant à rejoindre Senek à coup régulier de compresseur. Alors que cette journée semblait déjà bien mouvementée, dans les derniers kilomètres avant Aktaou, Cola s’arrête une dernière fois pour porter assistance à une voiture à l’arrêt sur la bande d’arrêt d’urgence et la remorque à l’aide d’une sangle jusqu’à l’entrée de la ville. Notre homme est un véritable super-héros du désert !

Le lendemain, remis de nos émotions, nous descendons prendre le petit-déjeuner à l’hôtel. Après ces quelques jours passés ici, nous connaissons par cœur la carte. Les oeufs y sont à tomber par terre et les crêpes nous font voyager jusqu’en Bretagne. Mais à cette heure-là, nous ne savions pas encore que ce serait le dernier. Le jour même nous apprenons qu’il nous faut rejoindre rapidement le port de Kourik pour prendre la mer en direction de l’Azerbaïdjan.


NOS COUPS DE COEUR
Où manger ? 

Craft Burger
Карымсакова 3а, Atyrau

Une petite adresse à l’ambiance jeune et chaleureuse, à quelques mètres de la plage public. Nous y avons été accueillis avec la plus grande gentillesse pour savourer de bons burgers.

Restaurant « Makcim »
45.34669796,55.17394619
Beïnéou

Face à notre hotel, le Zeruik, nous avions pris nos habitudes dans cette petite cantine familiale sans prétention, en retrait du centre-ville. Nous y sommes venus à plusieurs reprises déguster une excellente salade César et un très bon chachlik, sur une belle terrasse ombragée.

Oural – 7 jours – 35 mètres d’altitude

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Notre entrée au Kazakhstan se fait au poste frontière de Ilek. Le contrôle est réalisé en toute simplicité. Côté russe, tout content de parler deux mots de français, le douanier nous indique d’avancer sans prendre le soin de jeter un oeil à nos valises. Même le pochon de thé en vrac, offert par Ivan, s’apparentant pourtant grandement à de l’herbe, passe le checkpoint.

Une fois de l’autre côté du pont pour rejoindre le poste frontière kazakh, même manège. Nos véhicules atypiques intriguent les gardes frontières et le contrôle n’en est pas plus strict. Tant et si bien qu’en moins d’une heure de paperasse, le Kazakhstan nous ouvre ses portes.

La ville la plus proche de ce côté de la frontière est à 150 kilomètres. La route est parfois non pavée, parfois asphaltée, mais le plus souvent constituée de jolis nids-de-poule. Dès les premiers kilomètres le paysage change. Les champs et bosquets russes laissent la place à de grandes étendues de plaine balayée par le vent, sans arbre, ni la moindre verdure à l’horizon. La chaleur a également repris ses droits et les vêtements de moto semblent de plus en plus lourds et irrespirables.

A notre arrivée à Oural, nous commençons par récupérer l’huile moteur réservée pour nous dans la boutique Motul de la ville.

Le moto club, surnommé “Gengis Khan,” est alerté de notre arrivée et deux de ses membres nous rejoignent dans le but de nous rencontrer et nous aider sur quelques sujets. Après un faux-départ, suite à la perte du téléphone de Julien, retrouvé dans le sable à quelques mètres de la boutique d’huile ; les deux motards nous dégotent un bon hôtel avec parking, dans notre budget (grâce à une très bonne négociation de leur part) et dans le centre-ville.

Notre après-midi est consacrée à la recherche d’une assurance pour pouvoir circuler légalement sur les routes du pays. Nous trouverons notre bonheur chez Nomade Assurance. Accueillis chaleureusement dans leur petit bureau avec un verre de jus de pêche, nous signons auprès d’eux un contrat nous couvrant pour les 15 jours suivants, le temps pour nous de rejoindre la mer Caspienne.

Notre seconde journée kazakhe débute par le copieux buffet de petit-déjeuner proposé par l’hôtel. Sur la table trônent oeufs, saucisses et viennoiseries. En même temps que nous prenons des forces pour la journée,  nous sympathisons avec un homme originaire d’Almaty. Au fil de l’échange, il nous bluffe par sa connaissance de la géographie du monde, au point de pouvoir comparer avec une grande précision les superficie en km2 de nombreux pays.

La journée se poursuit en compagnie d’Alex et Sabit, les deux acolytes du moto club. En leur compagnie nous découvrons la ville et son histoire. Comme celle du pays, elle se lie à celle de la dynastie des Khan. Gengis Khan, symbole de l’invasion des mongoles sur les terre d’Asie centrale, est ainsi érigé ici en héros. La ville d’Oural fut construite aux confluences du fleuve du même nom et de la rivière Chagan. Sa localisation, plus proche en kilomètres de Moscou que d’Astana, la capitale kazakhe, résume en partie l’atmosphère qui règne dans la ville. Ainsi dans le centre-ville de Oural, il est à la fois possible de succomber aux charmes de vieilles bâtisses russes du 18e et 19e siècle au mur en bois, ou de celles inspirées à cette même période des influences méditerranéennes ; le tout cohabitant aujourd’hui avec les stigmates de l’architecture soviétique. Pour ce qui est des principaux monuments qui valent le coup d’oeil, nous retiendrons la Cathédrale du Christ Saint-Sauveur dont la construction débuta en 1591 pour s’achever plus de 300 ans plus tard ;  et l’impressionnant mémorial de la seconde Guerre Mondiale, dont les colonnes transpercent le ciel. Là encore, comme chez eux, les soviétiques n’ont pas fait dans l’intime et le fleuri, mais bien dans la démesure.

Après cette étape à Oural, nous prenons de nouveau la route en direction du sud, et la ville de Inderbor. Nous ne rencontrons aucune difficulté sur la route, pas de bosses à l’horizon qui risquerait de contrarier les moteurs et l’asphalte, tant que que nous suivons les routes principales, est en bon état. Nous suivons donc les yeux fermés ces lignes droites tracées à la règle traversant la steppe désertique. Seule originalité, de nombreux troupeaux de vaches et de chevaux sauvages viennent rompre cette monotonie. Sur la route nous recevons de nombreux coups de klaxons de bienvenu ; même les policiers sur la droite de la route nous saluent !  Serions-nous de retours sur les routes colombiennes ?

Nous arrivons en milieu d’après-midi dans la ville d’Inderbor. Les rues sont désertes et le bitume cette fois y est en très mauvais état. Nous nous mettons en quête de quelque chose à nous mettre sous la dent. Mais la ville est vide et les restaurants fermés. La période du Ramadan ne nous facilite pas la tâche pour trouver un restaurant ouvert à 15h. C’est finalement dans un petit café que nous parviendrons à commander une salade et des poivrons farcis, le tout accompagné d’une petite bière. De retour dans les rues de la ville, la vie à repris son cours, les enfants jouent avec ballons et vélos tandis que les adultes s’affairent aux tâches de la vie quotidienne : courses à l’épicerie, réparation de mur, livraison en charrette,… Dans cette ville, les traits du visage des personnes que nous croisons ont changé. Les profiles russes ont laissé la place aux visages d’Asie Centrale. Les habitations ont, elles aussi, évoluées. Dans ces petits villages de la steppe, les maisons en terre et aux toits plats ont remplacé les précédentes habitations en bois ou en parpaing et aux toits inclinés.

Sur les conseils de Sabit de Oural, nous quittons Inderbor et rejoignons Atyraou par une petite route secondaire qui s’avère en bien meilleur état que l’axe principale. Sur cette nouvelle ligne droite, nous croisons notre premier troupeau de chameaux en liberté. Au fil des kilomètres, ces emblèmes du désert se succèderont à multiples reprises, traversant parfois la route juste devant les side-cars.

Une centaine de kilomètres avant Atyraou, nous quittons une nouvelle fois l’axe principal et partons à la découverte des vestiges de l’ancienne ville médiévale de Saraïtchik. La ville était autrefois un important carrefour commercial, sur la Route de la Soie. Mais sur les lieux de ce site historique, nous ne trouvons plus, aujourd’hui, qu’un petit musée et trois pierres, uniques vestiges de cet ancienne cité.

Nous arrivons en fin d’après-midi dans la ville pétrolière de Atyraou, sur les rives du fleuve Oural. Nous sommes hébergés dans une petite auberge de jeunesse, à l’accueil très charmant. Alors qu’innocemment, pour éviter de renouveler nos déboires de la veille, nous nous renseignons pour trouver un endroit où déjeuner à cette heure tardive, la famille se propose de nous offrir le repas. Au menu, une copieuse assiette de poisson accompagné de pâtes et de salades composées kazakhes.

Nous profitons de la fin d’après-midi pour nous promener sur les rives aménagées du fleuve et ainsi découvrir la ville. Ici, comme dans ses consœurs traversées précédemment, se mélangent les cultures. La mosquée côtoie, à quelques centaines de mètres, l’église orthodoxe.

Le jour suivant, nous poursuivons notre périple en prenant la direction de Koulsary à 200 kilomètres de là. La route est bonne, les coups de klaxons se poursuivent et le paysage reste plat. Mais au fil des kilomètres de petites lagunes salées apparaissent, offrant deci delà de jolies couleurs à cette étendue désertique. Quant aux animaux en liberté, ils continuent de partager notre route. Au milieu de la vaste plaine, les chevaux se regroupent pour s’abriter du vent qui souffle de plus en plus fort.

Arrivée à Koulsary, nous déjeunons dans un café de « routards ». Nous y rencontrons deux motards russes qui termine une virée pendant laquelle ils ont sillonné la région. Après un bref échange sur ses trésors et lieux incontournables, ils nous conseillent un hôtel de « motards » à l’entrée de la ville. Nous nous mettons donc en quête du « Uncle Lesha » . Après plusieurs dizaines de minutes à tourner dans les rues de la ville, impossible de mettre la main dessus et les deux autres hôtels que nous croisons sont, eux, hors de prix. Après des recherches approfondies sur l’application iOverlander, pour trouver une alternative pour la nuit, nous y découvrons que l’hôtel de Lesha se trouve en faite dans la ville suivante de Beïnéou, à 200 kilomètres de là. Nous atteignons la ville vers 21h et y faisons la rencontre incongrue de Lesha, un véritable personnage qui nous reçoit comme des « invités de marque, » dans son humble demeure.

Les cents premiers kilomètres après Beïnéou sont similaires à ceux des jours précédents, mais après la petite salade de la pause déjeuner, les première collines apparaissent. Et c’est après une petite côte que s’offre devant nous notre premier canyon. La route emprunte une grande descente au milieu des falaises calcaires, aux couleurs pourpres et blanches, caractéristiques de la péninsule de Mangystaou où nous venons d’entrer.

La pluie nous accompagne depuis maintenant quelques dizaines de kilomètres et mettent un terme à notre projet de rejoindre le lac Tuzbair. Alors que le GPS, indique sa localisation à moins de 10 kilomètres, nous n’en ferons que trois ; la pluie ayant rendu la piste trop boueuse pour nous permettre de progresser dans cette direction. En regardant le ciel, nous comprenons rapidement que l’orage ne tardera pas et qu’il nous faut rapidement atteindre la petite ville de Shetpe pour y trouver un toit où nous abriter.

Toute la nuit, la pluie s’abattra sur la région, la première sur la péninsule, la dernière avant Aktaou notre prochaine ville étape.


NOS COUPS DE COEUR
Où manger ?

Toykhana Na Malibu
улица Пугачева 38, Oural

Une adresse traditionnelle, sur les bords du fleuve Oural, réputée pour les banquets familiaux comme pour les dîners en plus petit groupe. En comité restreint, il est possible de partager le repas dans une petite pièce isolée, assis en tailleur autour d’une table basse. Sur les cartes, sont présents les plats traditionnels kazakhs. Nous y avons savouré un excellent Beshbarmak, un plat de viande de cheval bouillie, dont le nom signifie « cinq doigts », parce que le plat se mange avec les mains !

Où dormir ?

Hostel Keruen
Карымсакова 3а, Atyrau

Auberge de jeunesse sans prétention, mais jolies aménagements, des dortoirs avec lit superposés en bois et un accueil des plus chaleureux. La cerise sur le gâteau : un copieux petit-déjeuner.

Uncle Lesha
45.34669796,55.17394619
Beïnéou

Cette adresse n’est en aucun cas un hôtel, mais bien un repère pour baroudeur à deux ou trois roues, souhaitant faire une rencontre incongrue entre Atyraou et Aktaou. Lesha est un personnage qui mérite à lui seul une étape. Son atelier mécanique pourrait être d’un grand secours en cas de coup dur pour vos fidèles destriers.