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Le Pérou, est un pays de 1 285 315 km2, aux paysages et reliefs très diversifiés. Arpenter ces routes du Nord-Ouest au Sud-Est au guidon des Urals, offre donc différentes expériences de conduite.
Au Nord du pays, en longeant la côte Pacifique, nous traversons pour la première fois un désert de sable sur plusieurs centaines de kilomètres. L’expérience est incroyable ; de part et d’autre de la route, les dunes de sable s’élèvent pour tuer la monotonie de la route. Le bitume trace de longues lignes droites noires qui contrastent avec la couleur jaune du sable. De temps en temps, le vent fait virevolter quelques grains qui viennent danser sur l’asphalte avant de s’échapper sous nos roues.
Moins romantique, lors du tracé de notre itinéraire nous avons choisi de passer par Lima pour rejoindre Ica avant de nous rendre à Ayacucho. Or, il n’existe pas à ce jour de route qui contourne la capitale. L’axe principale traverse Lima du Nord au Sud en passant à quelques centaines de mètres du centre historique. Au milieu des bouchons, depuis l’autoroute, on aperçoit le clocher de la Cathédrale. Il nous aura fallu pas moins de 4 heures pour réaliser les 15 kilomètres qui traversent la capitale. Nous avançons de quelques mètres par minute, cul-à-cul avec des camions et des bus, pris au piège, eux aussi, de ce trafic infernal.
Au Sud de la capitale sur la Côte Pacifique dans les environs de la ville de Pisco, les vignes s’étendent à perte de vue. Elles ont une taille très haute qui forment des sortes de tonnelles sur des centaines de kilomètres. Les parcelles sont démesurées et cultivées par de grandes exploitations qui travaillent le raisin pour élaborer le plus célèbre des breuvages péruviens : le Pisco. Cet alcool de près de 40° est obtenu après la distillation du jus de raisin.
Pour nous, ce paysage est avant tout une bouffée d’oxygène après les paysages désertiques du Nord et la difficile traversée de Lima.
Autre zone géographique et autre décor ; en souhaitant rejoindre le Parc du Huascarán depuis la côte nous avons longé le « Cañón del Pato » sur près de 55 kilomètres. Nous empruntons alors une petite route, dont la largeur n’excède pas celle d’un camion, qui serpente dans le fond du canyon créé par le lit de la rivière. Un paysage spectaculaire, qui nous écrase par l’immensité de ses falaises de part et d’autre de la route. De nombreux tunnels sans lumière ni aucune mesure de sécurité viennent ajouter un peu de piment à cette étape. Ne pouvant apercevoir leur sortie, il faut alors jouer du klaxon pour signaler sa présence aux véhicules arrivant en face. Nous avons alors compris l’intérêt des gros klaxons Sud-Américain, car si par malheur une voiture n’a pas entendu votre signal et vous fait face, il faut alors descendre des side-cars pour engager la marche arrière manuelle. Après une belle demi-journée à suivre les courbes de la rivière, accompagné d’un florilège de notes de klaxons, nous atteignons la ville de Caraz, porte d’entrée du Parc Huascarán.
Au Pérou, nous avons également renoué avec le plaisir de la piste. La première fois pour rejoindre le village de Maras. Alors que nous souhaitions emprunter un axe asphalté, une dizaine de kilomètres après la ville de Izcuchaca, on nous informe que la route est coupée pour travaux. Un ouvrier du chantier nous indique que la piste qui part sur la droite mène à Maras. Avec prudence, nous lui demandons l’état et le relief de la piste. Le gentilhomme se veut rassurant, la piste est peu caillouteuse et monte peu, avant d’accéder à un grand plateau qui rejoint Maras. Ni une ni deux, nous nous embarquons sur ce chemin. C’est à partir de là que nous avons commencé à relativiser les indications des locaux. La piste s’élevait sur une vingtaine de kilomètres, la pente n’était pas excessive, mais les pluies des jours précédents rendait certains passages délicats. Un troupeau de moutons traversant la piste devant les side-cars, nous obligera à faire une pause dans un dévers, que nous aurons du mal à quitter.
Plus au Sud, en voulant rejoindre la Vallée du Colca depuis la ville d’Espinar nous empruntons, entre Condorama et Yanque, l’une des plus belles pistes depuis le début de ce voyage. Son revêtement très roulant permet d’effectuer facilement la centaine de kilomètres qui la constitue. Au milieu du Parc du Colca, elle offre une vue imprenable sur le lac du même nom et sur les « Castillos de Callalli », d’immenses falaises taillées par le vent.
Malheureusement, outre la beauté des paysages péruviens, sur la route nous sommes de nouveau confronté à l’un des enjeux du 21ème siècle : la gestion des déchets.
De part nos activités personnelles et professionnelles, nous sommes sensibles à cette question. Notre souhait n’est pas ici d’apporter un jugement sur une des réalités du pays, mais de partager notre triste constat. Dans ce combat pour l’environnement, nous connaissons la part de responsabilité des entreprises de grande consommation. Nous souhaitons cependant vous rapporter la réalité du terrain pour mettre en lumière le manque d’investissement portée à cette problématique par la société péruvienne et particulièrement par ses instances publiques.
En effet au Pérou, sur cette question de la gestion des déchets, il y a tout à faire. Nous avons été choqués de voir sur la route, des décharges à ciel ouvert, sur plusieurs dizaines de kilomètres. Du fait qu’ils soient indiqués par des panneaux de signalisation, ces lieux de dépose d’ordures semblent tolérés par les instances locales. Dans les agglomérations, les poubelles sont peu présentes, peu visibles, et le tri-sélectif est inexistant. De plus les ordures ne sont pas récoltées régulièrement et il n’est pas rare de voir des sacs éventrés par les chiens errants qui se restaurent de leur contenu.
En discutant de cette problématique avec les péruviens ; tous étaient unanimes sur le sujet, et regrettaient la présence d’un si grand nombre de déchets sur les abords des routes et des sentiers. Mais à côté de cela, nous ne pouvons compter le nombre de fois où nous avons pris en flagrant délit une personne jeter délibérément un papier ou un emballage dans la nature. Nous espérons donc que les instances publiques locales pourront investir quelques deniers dans les prochaines années pour la sensibilisation et l’éducation des gestes éco-citoyens.
Nous avons également été surpris de constater que dans chaque ville ou village que nous traversons, le bâtiment le plus moderne n’est autre que le terrain de foot à cinq, couvert, où se retrouvent régulièrement les jeunes des environs pour partager la “Pelotta”, ou tout simplement discuter entre eux à l’abri des intempéries et du soleil.
Notre expérience sur les routes péruviennes, c’est aussi, croiser sur notre route des véhicules emblématiques du pays. Dès les premiers kilomètres, il a fallu notamment s’adapter à la principale particularité locale : la cohabitation avec les “Tuks-Tuks” sur l’asphalte péruvien. Principal moyen de transport pour les habitants des villages comme des grandes agglomérations ; ces motocyclettes à trois roues sont partout. Chacun y va de sa décoration, les clubs de foot et les super-héros sont grandement représentés sur les stickers. Ils devancent les marques Nike et Adidas, et les boissons énergisantes. Ceux qui peuvent se le permettre, opteront pour un cockpit couvert qui protège des intempéries.
Côté circulation, ces bolides se faufilent dans les moindres espaces ; créant leur propres voies entre les files des voitures ou le long des trottoirs. Les règles de priorité sont subsidiaires. Pour résumer au plus simple : quelque soit la signalisation, les Tuk-tuks ont la priorité ; et ce même s’ils circulent à contre-sens dans une rue à sens-unique. Ultime vigilance, l’utilisation des clignotants n’étant que marginale ; s’il vous est amené de suivre l’un d’eux, attendez vous à ce qu’à tout moment il puisse s’arrêter pour laisser descendre son passager, sans même nécessairement se rapprocher du trottoir.
Sur l’asphalte péruvien, nous avons également, à de nombreuses reprises, doublé, et plus souvent encore, été doublé, par de vielles Coccinelles Volkswagen. Ces vieux modèles sont restaurés par les garagistes locaux et s’offrent de nouvelles heures de gloire du Nord au Sud du pays. Chacune a son caractère en fonction de la personnalité du pilote. Elles peuvent être repeintes avec une couleur funky ou agrémentées de jolies petites fleurs. Il arrive aussi parfois que se soit plus tape-à-l’œil avec des bas de caisse effleurant la route, des pots d’échappement bruyant ou l’ajout de gros boomers dans le coffre, pour attirer les regards.
Dès notre arrivée à Tumbes, première ville traversée au Pérou, nous avons fait la « course » avec l’une d’elles au milieu des embouteillages de la ville. Chacune dans sa voie, nous nous sommes doublés successivement, au rythme du feu rouge qui créait les bouchons. Dès cette première confrontation, nous avons dû nous incliner face à cette sympathique “Coc’s” arrivée première à hauteur du feu tricolore. En attendant le passage au vert, son pilote est sorti de sa coccinelle verte pour nous offrir une casquette en souvenir de cette course d’escargot.
L’autre roi des routes péruviennes est l’autocar. Principal moyen de transport pour se rendre d’une ville à l’autre du pays, ils sont partout, sur les axes principaux comme sur les routes secondaires pour desservir les plus petites villes. Chacune d’entre elles possède ainsi sa gare routière, souvent constituée d’un immense hall où se succèdent les petites boutiques de chacune des compagnies qui annoncent à haute voix les prochaines destinations proposées. Toutes proposent les mêmes destinations à des horaires et des tarifs différents en fonction du standing des bus. Ce dernier critère peut avoir son importance puisque les grandes villes sont souvent séparées de plus d’une dizaine d’heures (Lima-Arequipa = 16h par exemple). En passant à proximité de ses gares routières nous croisons régulièrement des backpackers reprenant la route vers une nouvelle destination.
Peut-être nous suivront-ils vers les rives boliviennes du lac Titicaca, notre prochain terrain de jeu ?