Baignade Uruguayenne

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Carrières de Riachuelo
Coordonnées GPS : 34°26’36.0″S 57°43’30.5″W

L’Uruguay est un pays, qui depuis de nombreuses années, est tourné vers l’Océan Atlantique. Pour comprendre la relation étroite qu’entretient le pays avec sa façade océanique, il faut remonter quelque peu dans le temps.

Au 18e siècle, la bande orientale du Rio Uruguay, qui aujourd’hui forme le territoire de l’Uruguay, n’est qu’une vaste prairie entourant le port de Montevideo. Les caractéristiques géographiques de la région, avec son mont facile à repérer (qui donnera son nom à la ville) et une baie formant un vaste mouillage naturel, offrent un emplacement stratégique pour la création du port. Construit à l’origine pour être un bastion militaire, il devient rapidement un port de commerce rival à celui de Buenos Aires ; la lutte entre les deux ports marquant le début de l’identité uruguayenne.

L’essor du commerce maritime, au début du 19e siècle, va entraîner l’expansion de la ville, renforcer son identité portuaire, et accroître son désir d’autonomie, vis-à-vis de la métropole régionale qu’est Buenos Aires.

L’Uruguay naît en 1828, du souhait des britanniques de créer un “État tampon” entre l’Argentine et le Brésil. La ville de Montevideo s’enrichit alors par le commerce, mais reste un port sans arrière-pays. Une caractéristique qui marque l’histoire du pays, opposant constamment la capitale et sa culture venant de l’Europe, à “l’intérieur” du pays et sa culture des “Gauchos”.

Depuis la fin du 19e siècle, la fonction portuaire de Montevideo perd de son importance. Les liens entre la ville et le port se distendent. C’est le début de la ville “européenne.” Les vagues d’immigrations françaises et italiennes modifient profondément les comportements, les modes de vie et donnent un caractère nouveau à la ville. La capitale se tourne alors vers les plages qui s’étendent le long de la côte Est. Bougainville, marin français du 18e siècle, notait déjà dans son carnet de route que tout, à Montevideo, invitait le matelot à l’oisiveté des jours tranquilles sous un climat heureux…

Au 20e siècle et encore aujourd’hui, c’est une nouvelle fois ce climat et sa douceur de vivre, qui incita les Uruguayens à renouer un lien fort avec l’océan pour son côté récréatif. Le port, réaménagé à cette période, n’offre alors à la baie qu’un intérêt économique ; quand le remblai et sa promenade, propices au farniente, sont érigés le long des plages de l’Atlantique. La ville et le pays se tournent donc vers l’océan pour sa fonction “balnéaire” en aménageant le front de mer, en créant des ports de plaisance et en développant les “villes de la côte”.

Lors de notre traversée du pays, la douceur du climat nous invita, nous aussi, au farniente et à la baignade. Mais ce n’est finalement pas dans les vagues de l’océan, ni sur la plage de l’une des stations balnéaires du pays que nous avons connu le bain le plus marquant d’Uruguay.

En interrogeant Jorge, sur un spot de baignade intéressant avant d’atteindre Montevideo, il nous invita à découvrir l’embarcadère de Riachuelo.

Situé à 12 kilomètres de Colonia del Sacramento, l’embarcadère est connu des marins locaux comme étant une petite zone de mouillage paisible, sur la petite rivière du même nom, où il est agréable de venir apprécier un joli coucher de soleil sur sa plage déserte.

Mais l’un des charmes les plus exclusifs de Riachuelo réside sans aucun doute dans ses carrières. En effet, l’Uruguay compte plusieurs jolies carrières qui valent le détour, réparties le long de ses côtes. Un secret bien gardé par les locaux, qui n’en révèlent que rarement l’accès afin de préserver la tranquillité des lieux.

Sur les conseils de Jorge, nous avons, après le petit-déjeuner, pris la direction de l’embarcadère de Riachuelo, puis laissé les side-cars sur son parking pour emprunter le petit sentier qui mène à cette piscine naturelle. Elle s’est formée après l’exploitation d’une ancienne carrière de pierre qui, lorsqu’elle a atteint la nappe phréatique en dessous, s’est remplie d’eau. Entourée de rochers qui offrent de jolis espaces pour bronzer et se reposer, nous sommes seuls au milieu de ce magnifique espace naturel.

Pour honorer les influences un peu hippies de notre ami Jorge, nous prîmes plaisir, Julien et moi, à nous présenter face à cette réserve d’eau, dans notre plus simple appareil, en haut du pic rocheux le plus élevé.

Pour l’atteindre, il faut tout d’abord se lancer dans une ascension épique d’une petite dizaine de mètres, au milieu de ce qui s’apparente à une jungle, lorsque l’on s’y aventure dénué de tout vêtement. Puis vient le moment de faire face au vide, un petit coup d’œil à droite pour s’assurer qu’aucun promeneur est en approche, un petit coup d’œil à gauche pour trouver le soutien de sa petite amie ; et il faut s’élancer. Les cinq mètres estimés ne représentent pas en soi une grande performance, mais le sentiment de liberté que procure ce plongeon, de bon matin, rend le moment unique. La température de l’eau est agréable, le soleil est encore doux, les mouvements de brasses dégrippent le dos, il est temps d’affronter de nouveau la jungle pour réitérer l’expérience. Une fois l’adrénaline remplacée par un léger sentiment de fatigue à la vu de l’ascension nécessaire pour atteindre le piton rocheux, vient le moment de trouver place sur la serviette, pour quelques minutes pendant lesquelles les rayons du soleil font disparaître les perles d’eau qui ruissellent sur nos peaux humides.

Après avoir savouré l’instant présent, vient le temps de se rhabiller, pour retrouver les codes de la vie en société et refermer cette parenthèse enchantée, offerte par le pouvoir des rencontres de voyage.

Rencontre uruguayenne

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Jorge et ses noeuds marins

Après avoir visité la ville historique de Colonia de Sacramento, nous longeons les platanes de l’ancienne route qui mène à Montevideo. Quelques kilomètres après la sortie de « Colonia », nous bifurquons à gauche, après le village de Riachuelo, pour s’engager, sur une plus petite route encore, qui mène chez Jorge. Ce vieux loup de mer solitaire, vieil ami de Ricardo (notre ami motard de Buenos Aires) nous accueille pour la soirée. Les premiers échanges sont très réservés. Ébéniste de métier et de passion, c’est en discutant du travail du bois, que la relation de confiance se créée. Tout en nous contant son histoire, qui le conduisit du Lycée Français de Buenos Aires à l’Uruguay ; il nous mena au fond de son jardin, nous présentant chaque arbre et ses essences, jusqu’à son bel atelier. Il y règne une douce odeur de bois coupé. Entre les copeaux et les planches brutes se cachent de jolies pièces de mobilier façonnées par les mains de l’artiste.

Nous rebroussons ensuite chemin jusqu’à son antre. Nous y découvrons une jolie pièce de vie, à la décoration simple et cosy. Le bois y est bien-sûr très présent, et de nombreux objets maritimes ornent les murs.

Jorge voue également une véritable passion pour la mer et les océans. Marin aguerri, il tira de nombreux bords sur le Rio de la Plata, avec Ricardo, dans sa jeunesse.
Nous passons la soirée autour d’un agréable apéro-dinatoire, accompagné en fond sonore du jazz de Claude Nougaro. Les discussions dérivent au gré des vents, entre les thématiques de la mer, du voyage et de l’aventure.

En découvrant un joli bouquin sur les nœuds de marin, la conversation glisse sur ce sujet. Jorge nous raconte alors ses déboires avec les nœuds, qui l’incita à se replonger dans cette bible. Dans sa jeunesse, par exemple, alors qu’il quittait le port de Buenos Aires avec son ami Ricardo, il lui demanda d’accrocher l’annexe du voilier au taquet du pont arrière. Mais après quelques miles, ils s’aperçurent que la petite barque ne suivait plus le sillon du voilier. Ne voulant pas incriminer son compagnon d’équipage, nous ne saurons jamais avec certitude, et ce malgré un fin sourire malicieux, qui du boute ou du nœud fut défaillant, mais une chose est sûre, l’annexe fut perdue. Quelques années plus tard, c’est en grimpant sur un toit, assuré par une corde, qu’une erreur de nœud aurait pu lui coûter la vie. Il lui fallu alors plusieurs jours de convalescence pour se remettre de cette chute de plusieurs mètres. C’est à la suite de cette mésaventure qu’il se jura de réviser et de poursuivre son apprentissage des nœuds ; avec pour objectif d’employer la technique la plus adaptée à chacune des situations du quotidien.

Au réveil, le temps que les tentes sèchent après la rosée du matin, nous rejoignons Jorge pour partager un petit-déjeuner fait de maté et de nœuds de marins. C’est par cette tradition qu’il entame chaque journée, et c’est avec grand plaisir que nous nous pliâmes à cette coutume ; apprenant, paille à la bouche, à réaliser les zigzags du nœud « jambe-de-chien » avant de reprendre notre périple vers Montevideo.

Sur les routes uruguayennes

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Nous quittons Gualeguaychu, dernière ville argentine, de bon matin. Avant la frontière, nous passons par une station service et échangeons avec le pompiste, nos derniers Pesos contres quelques litres d’essence. Vingt kilomètres plus loin, nous passons le poste frontière argentin et traversons le pont qui enjambe le fleuve Uruguay pour rejoindre le pays du même nom. Une fois de l’autre côté, nous n’avions pas anticipé la présence d’une barrière de péage qui nous empêche de rejoindre le poste frontière Uruguayen. Le droit de passage sur le pont, n’est pas d’un montant très élevé, environ 1,50€, mais nous n’avons dans nos poches ni monnaie argentine, ni monnaie Uruguayenne pour le payer. Nous essayons, en vain, de négocier le passage des side-cars avec la personne du péage ; mais devons nous résigner à les garer sur le côté et passer à pied pour essayer de récupérer du liquide dans un petit commerce Duty Free du poste de frontière. Nous avons demandé si nous pouvions payer une bricole par carte, plus chère que son prix réel, et récupérer la différence en liquide, en vain. C’est finalement dans un restaurant, qu’un jeune serveur accepta d’offrir quelques Pesos à Marie et Émilie.

Quelques minutes plus tard, c’est donc au guidon des side-cars que nous traversons le péage pour rejoindre le poste frontière Uruguayen, premier poste frontière, où il n’est pas nécessaire de descendre de son véhicule pour obtenir le tampon du visa sur son passeport (nous avions cependant besoin d’aller à l’intérieur d’un bureau pour l’importation des véhicules). Dans ces conditions, les démarches administratives ne prendront que quelques instants et rapidement nous prenons la direction de Colonia del Sacramento.

Pour atteindre cette ville au riche passé historique, nous empruntons de jolies petites routes de campagne. Les platanes qui bordent la route, rappelle le Sud de la France.
Nous croisons un rallye de veilles voitures en chemin. Sur plus d’une dizaine de kilomètres, un défilé d’une centaine de bolides d’un autre temps, pilotés par des passionnés, nous font face. BMW, Ford et Fiat sont les marques plus représentées. À l’arrière du peloton, arrêtés sur le bord de la route, le nez dans le capot, les retardataires doivent faire face à de légers contre-temps mécaniques. Sous ce soleil estival, au contact de l’asphalte, les températures s’emballent et mettent les machines et les pilotes à rude épreuve.

La marque Fiat est d’ailleurs très implantée dans le pays. Sur la route, nous ne croisons pas les dernières voitures présentées par la marque aux salons automobiles ; mais bien de nombreuses vieilles Fiat Uno. Le plus souvent laissées au repos, sur une place de parking, à l’ombre d’un platane. On les reconnait à leur forme cubique singulière, les petits picots de rouille sur leurs carrosseries colorées, et leurs finitions intérieures faites de vieux plastique, de tissus bariolés et dépourvus de tout électronique. La Uno illustre parfaitement la simplicité des Uruguayens qui privilégient la discrétion de cette petite voiture aux affres des gros 4×4 que nous avons pu croiser dans des pays précédents.

Après avoir passé la nuit dans les alentours de Colonial del Sacramento, nous poursuivons notre périple vers Montevideo. En chemin, nous nous arrêtons dans l’une des nombreuses échoppes de bord de route, faites de bric et de broc. Nous y achetons du fromage et de la confiture de figue pour agrémenter nos futurs petits-déjeuners.
L’entrée dans la capitale Uruguayenne sonne la fin de l’aventure sur les routes d’Amérique du Sud. Nous offrons un dernier coup de propre aux bolides dans une station de lavage. Un charmant jeune homme joue de son éponge au rythme de la musique. Sur un son reggaeton, craché par une vieille enceinte, accrochée sur le mur jaune de son petit « parcadero-lavadero », il fait danser ses dreadlocks. Les side-cars en ressortent beaux comme des camions, parés pour la grande traversée. Celle qui les conduira de Montevideo à Riga en Lettonie.

Montevideo et la côte Uruguayenne – 7 jours – 43 mètres d’altitude

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C’est après avoir traversé le pont qui enjambe le fleuve Uruguay que nous entrons dans notre dernier pays d’Amérique du Sud de ce voyage. Après quelques kilomètres, l’heure du déjeuner se présente et nous faisons donc une pause dans la petite ville de Dolores. C’est dans une petite échoppe que nous nous arrêtons pour manger un sandwich sur le pouce. Nous y rencontrons Zuleika, la ravissante jeune femme qui travaille dans la boutique ; et Bruno un personnage étrange, dont on ne sait toujours pas s’il est d’ici ou d’ailleurs, qui nous parle avec passion de ses voyages en stop, en Uruguay et dans les pays limitrophes. Au moment de notre départ il nous offre des rubans rouges, qu’il accroche à nos poignets pour éloigner les actes de jalousie.

Nous atteignons en début d’après-midi, Colonia del Sacramento, une ville devenue célèbre pour sa tranquillité déconcertante. Située sur les rives du Rio de la Plata, face à Buenos Aires (que l’on peut rejoindre par bateau en un peu plus d’une heure), cet ancien bastion fut fondé par les portugais en 1680. Pendant près d’un siècle, les espagnols se sont opposés à eux pour prendre le contrôle de la ville. Il l’ont finalement emporté après un siècle de bataille. La promenade au gré des petites rues pavées, dans l’enceinte de l’ancienne citadelle, permet de découvrir les jolis trésors du quartier historique, ses vieilles maisons colorées, ses plantes exotiques et sa petite digue où de nombreux pêcheurs viennent jeter l’hameçon. Un endroit où l’on a pris plaisir à flâner, apprécier une pause en terrasse sur une de ses nombreuses petites places, et observer l’océan à côté des jeunes uruguayens assis leur banc, le maté sous le bras.

Le voyage se poursuit jusqu’à Montevideo, une ville cosmopolite tournée vers l’océan.
Au lendemain de notre arrivée dans la capitale, nous profitons de notre passage dans les bureaux de Wave.VS, l’entreprise en charge de l’acheminement des side-cars vers la Lettonie, pour se promener dans les rues adjacentes qui offrent un premier aperçu du quartier historique de la ville.

En revanche les jours suivants sont surtout l’occasion de préparer les véhicules au grand voyage. Les journées s’organisent autours de sessions de machines à laver, de coups de propre sur les équipements de camping et d’ateliers mécaniques.

Trois jours après nos premiers pas dans la capitale, arrive le moment du chargement ; qui brusquement, en l’espace d’un instant, nous fait passer du statut de motard à celui de piéton.


Nous profitons de la fin d’après-midi pour visiter à pied, casque sous le bras, les alentours du port. Nous remontons jusqu’à l’immense place du palais législatif, bâtiment imposant à l’architecture inspirée de la Grèce Antique. C’est sur la place Juan Pedro Fabini que nous terminons notre promenade et rentrons à l’aide d’un bus dans nos quartiers.

Le lendemain après une grasse matinée, nous reprenons notre visite là où nous l’avions laissée la veille, en descendant du bus au même arrêt. Nous parcourons à pied le quartier historique et découvrons ses multiples œuvres de street-art. Nous débutons notre pérégrination par la large place de l’Indépendance, avant de nous aventurer dans la jolie rue Sarandi et de découvrir le marché du port. Ces anciens entrepôts ont conservé leur architecture industrielle, et sont devenus un haut lieu de gastronomie locale. Ils contiennent de nombreuses échoppes où l’on peut déguster d’excellents asados. Une douce odeur de viande grillée s’échappe d’ailleurs des entrailles de ce bâtiment où il règne une ambiance populaire et festive à toute heure de la journée. Une fois passée la pointe qui marque l’entrée dans la baie de Montevideo, nous poursuivons notre balade sur les ramblas avant de grimper au 22e étage du palais municipal pour admirer la vue panoramique sur l’ensemble de la ville.

Pour notre dernier jour en Uruguay, nous décidons de nous rendre à l’aéroport pour louer une voiture et partir visiter la côte située au Nord de la capitale. Nous partons donc en direction de Piriapolis, une petite citée balnéaire sans grand charme mais avec une belle plage de sable fin.

Nous assistons à l’arrivée des derniers coureurs de l’étape du tour cycliste de l’Uruguay. Une course bien plus accessible que notre Tour de France, où la simplicité est de rigueur et où les interviews des vainqueurs se font dans des chaises de plage.
La vue de tous ces sportifs a creusé notre appétit et c’est donc sur cette promenade de bord de mer que nous nous sommes laissés tenter par la dégustation d’un Chivito (copieux sandwich local à base de bœuf, garni de bacon, de fromage, de poivrons rôtis, de tomates et recouvert d’un œuf sur le plat) face à l’océan.

À notre retour dans la capitale, nous assistons au coucher du soleil depuis le haut du phare de la Punta Carretas, avant de rentrer faire nos sacs pour l’avion du lendemain. Une page de ce voyage se tourne, au fur-et-à-mesure que le soleil plonge dans l’océan.


NOTRE COUP DE COEUR
Où manger ?

Le marché du port

Le Mercado del Puerto, dans sa version originale, est un arrêt gastronomique obligatoire pour tout amateur de bonne viande. Très touristique de par son emplacement dans la vieille ville, il a tout de même su conserver son atmosphère populaire et festive. Prenez place au comptoir face au barbecue et savourez votre viande le couteau entre les dents !

Baignades Argentines

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Forte de 3 989 kilomètres de côtes à l’Est et de célèbres lacs andins à l’Ouest ; l’Argentine est un pays que l’on pourrait qualifier d’aquatique. Et pourtant, pendant les 34 jours de notre traversée du pays, les plongeons et autres trempettes rafraichissantes ne furent pas des plus mémorables. Il y a bien eu la baignade sur la plage de Rada Tilly par exemple, où nous souhaitions profiter des dernières lueurs du soleil. Mais nous n’étions pas les seuls à avoir cette idée ; et avons dû partager ce moment avec les nombreux argentins en vacances venus profiter du sable de cette station balnéaire. Dans les eaux des Rio Parana Guazu et Gualeyan bien que rafraîchissantes en ces fins de journée, à chaque fois un élément venait perturber nos mouvements de brasse. À Zárate, il a fallu se frayer un chemin entre les branches entraînées par le courant. À Galeguaychu, c’est dans une zone de baignade restreinte que nous avons dû faire des ronds dans l’eau.

Mais notre traversée de l’Argentine du Nord au Sud, nous a tout de même offert deux belles baignades savoureuses.

 Puerto Pirámides

Après une journée passée à sillonner les pistes de la Péninsule Valdez, dans la peau d’un « ranger », l’œil acéré pour observer la faune et la flore de ce microcosme de 3 600 km² ; nous avons fait étape dans le village de Puerto Pirámides.

Nous avons débuté notre escale par la visite de la caserne des pompiers, non pas que nous souhaitions nous assurer qu’en cas de problème pendant notre bain, notre prise en charge serait optimale, mais pour réaliser le remplissage de nos bidons en eau potable. Une anecdote, je vous le conçois, loin de nos préoccupations de baignade, mais qui reste un moment sympathique que je me devais de vous partager.

Nous arrivons sur la grande plage du village en fin d’après-midi. Elle se situe dans une baie, entourée par des falaises blanches hautes d’une centaine de mètres. À cette heure tardive la mer s’est retirée à une petite centaine de mètres, laissant libre choix aux touristes, d’étendre leur serviette sur le sable sec ou sur celui encore légèrement humide. Une fois installés, et le maillot de bain enfilé, il ne reste plus qu’à s’aventurer dans les eaux claires de la petite baie. A marée basse, le fond ne descend pas rapidement et il faut marcher sur quelques dizaines de mètres pour avoir de l’eau à la ceinture. Mais qu’importe, après une journée à rouler dans la poussière, c’est un vrai plaisir que de se débarbouiller dans l’océan Atlantique ; d’y faire la planche, les yeux fermés et le visage léché par les derniers rayons du soleil ; puis après avoir pris un peu d’eau dans les narines, se redresser et entamer quelques enchaînements de crawl.

De retour sur le sable nous entamons l’escalade de la falaise. La roche s’avance dans l’océan et à son extrémité, des jeunes ont étendu leur serviette et s’adonnent à de périlleux plongeons.

Il est alors temps pour nous de quitter la plage et la péninsule pour se diriger vers le Nord et la capitale du pays.

Tigré

Il n’est pas si facile de trouver un coin d’ombre sur l’asphalte de la métropole de Buenos Aires et à notre arrivée à Tigré, le thermomètre affiche 35°C. Ce fût donc avec un grand plaisir que l’on accueillit la proposition de Ricardo, de se rafraîchir dans le lac artificiel au bout de son jardin.

Ni une ni deux, nous troquons les tenues de moto contre les maillots de bain et plongeons depuis le ponton en bois dans les eaux tièdes de la lagune. Après quelques brasses, Ricardo met à l’eau son canoë et son kayak pour partir à la découverte du plan d’eau. Tels trois indiens, dans un beau canoë en bois, nous longeons les belles propriétés à l’architecture souvent avant-gardiste.

En ce week-end ensoleillé, des enfants jouent sur les pontons et des jeunes argentins profitent de ce bel après-midi pour chiller, au son de la musique électro. Nous sommes rapidement rattrapés par Julien et Marcos qui forment à eux deux, un bel équipage sur le dériveur de la famille. Bien que Marcos soit à cette période, en révision pour préparer le concours d’entrée dans une école d’ingénieur, il s’accorde une petite pause pour tirer quelques bords avec nous.

La voile est une tradition dans cette famille argentine, membre du club local depuis déjà plusieurs générations.

Au milieu du lac nous échangeons d’embarcation avec Julien ; je regoûte ainsi aux joies de la voile. Les premiers bords sont tirés avec Marcos, avant qu’il ne me demande de le débarquer sur le ponton. Il retourne à ses révisions, me laissant seul à la barre. Il me faut alors apprivoiser la gîte du dériveur et apprécier son comportement sur chacun des différents bords tirés. Au début, peu rassuré ; la confiance revient rapidement après avoir enchaîné quelques manœuvres. C’est donc fier comme un coq que je me rapproche du canoë de Marie, Emilie et Julien ! Oui mais voilà, à vouloir faire le malin, le bateau a fini par prendre de la vitesse et au moment d’empanner… C’est le dessalage ; me voici à l’eau, le dériveur couché sur le flanc à quelques mètres de là.
Après quelques mouvements de crawl, il me faut remonter sur le safran du bateau pour le redresser ; avant de repartir pour enchaîner les virements de bords, avec une vigilance accrue.

En cette fin d’après-midi, le soleil vient se refléter dans les eaux du lac, éblouissant quelque peu le petit skipper que je suis. Je poursuis la découverte du plan d’eau en réalisant des traversées entre ses différentes rives. Le ponton de la famille, lui, est situé dans un étroit bras du lac, orienté, à ce moment là, face au vent. Il me faut alors enchaîner les virements de bords pour remonter au vent et ramener le dériveur à la cale ; où, avec l’aide de Ricardo, nous le sortons de l’eau.

Cette session aquatique se terminera par une dernière série de plongeons dans le lac depuis le ponton. Il est alors l’heure de se sécher, pour se lancer dans la préparation de la parilla pour les grillades du soir.

Rencontres Argentines

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Juan Carlos de Bajo Caracoles

Arrivés en fin d’après-midi à Bajo Caracoles, petit village balayé par le vent, nous nous mettons en quête d’un espace abrité pour monter le campement. Il y a bien un petit panneau indiquant un camping mais personne pour nous offrir le moindre renseignement. Nous partons alors à la recherche de Juan Carlos dont nous avons trouvé les coordonnées sur iOverlander, une application dédiée aux voyageurs. Nous nous dirigeons, comme indiqué, vers le point de santé pour en savoir plus ! La porte nous est ouverte par quelqu’un, nous indiquant que Juan Carlos est absent… Mais après quelques instants, il nous dit qu’il blague, que c’est bien lui et nous invite à rentrer ! Il est infirmier et assure les premiers soins médicaux sur les 200 kms de la Ruta 40 en amont et en aval du village. Il nous offre l’hospitalité pour la nuit dans la petite chambre située entre la salle de consultation et la cuisine.

Dès les premières minutes, Juan Carlos nous met à l’aise grâce à son humour. Il nous offre le maté et nous présente son livre de cuisine française. Après quelques pages, nous découvrons la recette de la soupe à l’oignon. Une recette simple que nous cuisinons en entrée, pendant que « J.C » nous prépare des pâtes agrémentées d’une excellente sauce maison.

Fabio, le policier du village, en charge de la sécurité sur la même portion de route que Juan Carlos, se joint à nous pour la soirée. Il nous propose de découvrir le cocktail local à base de Fernet (une liqueur de plantes) noyé dans le coca ; une recette au doux goût de médicaments…

Pour vous retranscrire, comme il se doit l’ambiance de la soirée, imaginez une petite maison médicale perdue dans un hameau rural dans laquelle se trouve une petite salle de pause à l’arrière du bâtiment, avec une table, quatre chaises, un beau fauteuil et une boule à facettes. Cette seule source de lumière nous éclaire de toutes ses couleurs. Et pour couronner le tout, en fond musical, une playlist des années 80, avec un volume sonore poussé à l’extrême parce que : “Michael Jackson, ça s’écoute fort…”

Jorge – El Mago Hamelin à Gobernador

Soirée au camping de Gobernador Gregores, nous y rencontrons Jorge, un magicien professionnel qui voyage en exposant son talent en échange de l’hospitalité ou de quelques litres d’essence.

Son pickup Ford aménagé est original, il nous intrigue et par curiosité nous échangeons nos premiers mots. Une discussion qui se poursuivra autour d’une bière et de pâtes au pesto préparées sur le réchaud.

Jorge nous bluffe par ses tours de magie qui agrémenteront notre soirée. Le lendemain au moment des « au revoir », il nous apprend un dernier tour et nous offre les cartes truquées pour le réaliser.

Jean-Luc et Nelly

Nous rencontrons Nelly et Jean-Luc pour la première fois au pied du supermarché “Anonyma” de Gobernador Gregores. Ce couple de motards, de la campagne Seine et Marnaise, parcourt l’Amérique du Sud en BMW GS, dont ils sont tombés amoureux, il y a maintenant plusieurs années. À leur retour en France, ils ont pour projet d’acquérir un side-car Ural et c’est donc tout naturellement qu’ils sont venus à notre rencontre en apercevant nos bolides. Après avoir partagé nos anecdotes de voyage et échangé nos contacts, nous entrons alors dans le supermarché où, sur leurs conseils, nous achetons notre premier « bon » saucisson du voyage (tout est ici question de point de vue, et après quatre mois de voyage, nous sommes plus laxistes quant au respect de la règle des trois F : fleur, forme, fermeté).

Nous retrouvons les voyageurs de Adventura2, par hasard, dans la longue file d’attente de la station service Petrobras de El Calafate. Une coïncidence qui aboutit à une soirée de partage autour d’une copieuse « parilla » sur notre petit emplacement au camping municipal de la ville. Jean-Luc et Nelly, responsable des gourmandises de l’apéro nous régalent de saucisson, de fromages et de vin.

Après la visite du Perito Moreno et la poursuite du périple vers le Sud, c’est à la « fin du monde » que nous partageons les bières suivantes. À Ushuaïa, nous célébrons notre arrivée au point le plus austral de notre voyage dans un vieux pub à l’ambiance chaleureuse. La météo à l’extérieur est proche de celle de l’Irlande et la bière locale qui coule des tireuses n’a rien à envier à l’or ambré du Connemara.

Au moment de mettre le cap vers le Nord pour rejoindre la capitale Uruguayenne (lieu de mise en conteneurs des véhicules des deux équipes), nous adoptons deux stratégies différentes. La moto la plus rapide opte pour la route de l’Est qui conduira ses passagers du lac Bariloche aux chutes de Iguazu, tandis qu’avec nos « tracteurs » nous décidons de prendre la route la plus directe qui longe la côte Atlantique. À Montevideo, nous nous retrouvons une dernière fois en terre Sud-Américaine, mais nul doute qu’à notre retour en France, nous partagerons de nouveau, avec ces aventuriers des terres du Sud, un bout d’asphalte et quelques mousses.

Les pêcheurs de San Antonio Oeste

Sur les conseils d’un couple de retraités (rencontrés sur une aire d’autoroute YPF) ; nous plantons la tente au “Club Nautico Social y de Pesca » lors de notre étape à San Antonio Oeste. Le camping existe depuis quelques mois, mais le club organise des concours de pêche depuis plusieurs années déjà.

À notre arrivée, nous sommes accueillis par Luis, le patron des lieux. Sur ses conseils, nous optons pour l’emplacement à l’ombre à l’arrière du bâtiment. Une fois le campement monté, nous l’interrogeons pour savoir où est-ce qu’il serait possible de trouver du bon poisson pour les grillades du soir. Il passe alors sa main dans ses cheveux de vieux loup de mer, rendus si atypique par le sel et le soleil de ces nombreuses années passées en mer. Il nous propose de partager une « parilla » de poissons avec les marins du village qui vivent à l’année au camping.

Franco et son frère, Lucas, nous préparent une “paella” à partir des victuailles ramenées d’une précédente pêche. Les ingrédients mijotent dans un immense plat positionné au dessus du feu de bois. Nous partageons les premières bières Quilmes de la soirée, autour du feu.

Le lendemain, après une petite journée farniente, c’est à notre tour de préparer à nos hôtes un dîner constitué de spécialités culinaires françaises.

Nous devions initialement reprendre la route, le jour suivant, mais la mécanique en a décidé autrement. Et c’est finalement autour d’une parilla argentine que nous partageons cette troisième soirée au club nautique. Nous ne veillerons pas trop tard, car aux aurores, le bateau du Lucas largue les amarres, tandis que Franco et Nicolas doivent être au port de bonne heure pour réaliser la préparation des câbles de pêche sur leur bateau.

Au réveil, nous partageons le maté avec toute l’équipe avant qu’ils n’embauchent. Au moment du départ, nous faisons un crochet par le port pour saluer Franco et Nicolas. Au début réticent à ce que des touristes pénètrent dans cette enceinte surveillée, l’agent faisant autorité au port finira par nous accompagner sur les quais et nous présenter les différents bateaux présents. Avant de sortir, nous saluons brièvement Franco qui a fort à faire avec ses câbles.

Ricardo, Ivan et Marcos

Cette rencontre prend ses racines dans le petit village de Hornopiren sur la Carretera Australe. Nous avions alors recherché avec Ricardo et ses deux garçons, Ivan et Marcos, la billetterie du ferry qui permet de rejoindre le petit village de Chaiten. C’est finalement sur ce bateau que cette amitié a débuté. La traversée s’est faite sous un temps pluvieux, et malgré cela, les paysages étaient somptueux. Ricardo a quitté Buenos Aires avec ses deux enfants pour un voyage de plusieurs semaines en Patagonie au guidon de deux BMW.

Nous les avons ensuite retrouvés, sur le « glacier des explorateurs » à hauteur du petit village chilien de Puerto Rio Tranquilo. Nos chemins se séparant à la suite de cette aventure, Ricardo, nous proposa un carré de pelouse pour planter nos tentes lors de notre passage à Buenos Aires.

Quelques jours avant notre arrivée dans la capitale Argentine, nous avions donc repris contact avec lui et c’est avec enthousiasme qu’il nous a accueilli. À notre arrivée, Ricardo nous a sorti le « grand jeu », l’idée de planter les tentes a été remplacé par la mise à disposition de deux belles chambres ; et une fois nos valises déchargées, il se plia en quatre pour que tout se passe pour le mieux.

Le soir, toute la famille est réunie autour d’une parilla. Ricardo nous révèle les secrets d’une cuisson maîtrisée de la viande, qui réside dans la réalisation d’un feu sur une des extrémités du barbecue avant de disperser les braises incandescentes sous la viande. Ainsi il n’y a pas de risques de devoir se battre avec les flammes ; et pour savoir si la température est bonne, il faut être en capacité d’apposer sa main juste au-dessus de la viande dix secondes (pas plus – cuisson trop forte ; pas moins – manque de puissance).

Au réveil le lendemain, nous nous régalons d’excellents croissants au petit-déjeuner. Puis montons dans la voiture de Ricardo pour la visite de la ville de Tigré puis celle de la capitale Argentine. En fin d’après-midi, nous prenons possession de la cuisine pour préparer un dîner français à l’ensemble de la famille. Au menu, melon-jambon, poulet flambé accompagné d’un gratin dauphinois ; et en guise de dessert, des crêpes pommes-caramel au beurre salé (maison).

Pour la troisième journée en compagnie de Ricardo, nous accompagnons sa moto GS, avec nos Ural, pour visiter le village traditionnel de San Antonio de Areco, qui met en avant la culture « Gaucho » (cow-boys locaux) et les traditions de la campagne argentine. Nous terminons cette journée en partageant une bière dans le quartier Belén de Escobar.

Après une dernière journée à pérégriner dans les rues de la capitale, nous quittons Ricardo, Astrid et Marcos, le lendemain en fin de matinée. Les garçons nous escortent jusqu’au dernier échangeur de l’autoroute n°9. Nos routes se séparent une nouvelle fois, mais elles se recroiseront certainement prochainement…